« J'ai cru que j’allais mourir »
Naima habite à Tajgalt, une commune touchée par le séisme qui a frappé le Maroc le 8 septembre 2023. Un an après, elle revient sur cette catastrophe et l’impact qu’elle a eu sur sa vie.

Août 2024, région du Haut-Atlas. Douar d'Aguerd, détruit par le séisme en septembre 2023. | © K. Erjati / HI
Dans la nuit du 8 au 9 septembre 2023, un séisme de magnitude 6,8 a frappé le Haut-Atlas au Maroc. Une région montagneuse, peu accessible et dans laquelle les services de santé, physique et mentale sont peu présents. Pour accompagner les victimes dans leur reconstruction, Handicap International se mobilise depuis fin 2023 en organisant des unités de soins mobiles. Celles-ci parcourent les régions touchées par le séisme pour soutenir la population, notamment des espaces d’écoute et de partage, où chacun est libre de raconter son histoire.
Naima Boutekmezt, 35 ans, habite à Tajgalt. Elle a participé à ces séances et a livré son témoignage à l'association.
Quand la catastrophe s’abat dans le silence de la nuit
Cette nuit-là a été horrible. Lorsque la terre a tremblé, un mur de notre maison s’est effondré sur moi, au niveau des hanches et des jambes. Mon mari a tenté de m’aider mais à ce moment-là, je pensais que j’allais mourir, je ne pouvais plus bouger mon corps. J’étais ensevelie, recouverte de terre et de gravas au niveau de la poitrine et je sentais un énorme poids au niveau de mes jambes. Au début, mon mari n’arrivait pas à me sortir, c’était trop lourd pour lui, il a dû appeler du renfort pour me sortir et m’emmener au bord de la route en attendant les secours. C’est là que j’ai perdu connaissance. Lorsque je me suis réveillée, j’étais à l’hôpital.
À mon réveil, je ne pensais qu’à la mort, je ne voyais que la mort devant mes yeux… J’étais extrêmement choquée et j'ai cru que j’allais mourir. J’ai commencé à réciter la chahada (NDLR : prière, profession de foi dans la religion musulmane). Les médecins m’ont expliqué que j'étais dans un état grave et m’ont dit que j’allais avoir besoin de beaucoup de repos et de rester alitée une fois que je serais rentrée chez moi. Pendant trois mois, je n’ai été que sur le dos et malgré les médicaments et injections anti-douleurs, j’avais mal partout. Cela m’a pris du temps avant de pouvoir commencer à remarcher avec des béquilles.
Le soutien des proches face à l’amertume du quotidien
Après le séisme, pendant des semaines je ne faisais que pleurer. À l’heure actuelle, j’ai encore mal, je ne peux plus porter de poids ni faire les tâches ménagères comme j’en avais l’habitude. Je suis suivie par un médecin à Taroudant, il m’a prescrit des séances de rééducation mais je n’ai pas les moyens de me le permettre. Ces soins sont onéreux, c’est beaucoup pour moi et mon mari ne travaille plus non plus. Le quotidien est dur, mais je sais que je suis sur le chemin de la guérison.
Je m’inquiète surtout pour mes deux filles, dont je ne pouvais plus m’occuper. Ma sœur m’a beaucoup aidé et m’aide toujours beaucoup. Lorsque j’essaye d’effectuer les tâches habituelles de la maison, je sens mes mains trembler et me lâcher. Heureusement qu’elle est là car c’est elle qui s’occupe de mes filles quand je n’en ai pas la force. Sans elle et mon mari, qui me soutient aussi beaucoup, je ne peux rien faire.
Un traumatisme durable, mais une amélioration
Aujourd’hui, pour être honnête, je ne suis pas dans ma meilleure forme et je ne suis plus la même. Je suis devenue très nerveuse, notamment avec mes filles. Quand elles ne m’écoutent pas, il m’arrive régulièrement de faire des crises d’angoisse lors desquelles je n’arrive plus à respirer. Comme si quelque chose me bloquait la poitrine...
Tout est très difficile, encore maintenant. Je ne supporte plus rien, je n’éprouve de plaisir à rien et rien ne m’importe. J’ai beaucoup changé, avant je sortais souvent, je voyageais avec mes enfants pendant les vacances et maintenant, je n’aime plus sortir comme avant. Tout ce que je veux, c’est dormir et me reposer dans un coin de la tente même si je dors très mal et que je fais des cauchemars en permanence.
J’entends encore le bruit du séisme dans ma tête, je me lève en sursaut et en sanglotant et en ayant du mal à respirer. Lorsque mon mari me demande ce qu’il se passe et que je lui raconte que je sens la terre bouger ou que le plafond me tombe dessus, je sais bien que je suis la seule à le percevoir, que c’est dans ma tête.
Malgré tout, je me sens mieux, Dieu merci. J’espère continuer à aller mieux à l’avenir. Je sais que j’ai encore besoin d’un soutien psychologique et de séances de réadaptation, mais je ne suis plus alitée et je redeviens de plus en plus indépendante.
Comme de nombreux survivants du séisme dans son village, Naima a bénéficié des activités en santé mentale et soutien psychosocial mises en place, dans le cadre d’unités mobiles, par Handicap International et ses partenaires marocains : Migrations et Développement, le Réseau de réadaptation à base communautaire.
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