« J’ai encore des morceaux de métal logés dans ma jambe et dans ma colonne »
Elena a été blessée dans un bombardement en mars dernier en Ukraine. Quelques jours plus tard, sa fille était également blessée. Grâce au soutien de Handicap International, cette dernière est suivie en réadaptation.

Elena, 53 ans et sa fille Yevgenia, 34 ans, ont toutes les deux survécu à des bombardements dans l’est de l’Ukraine. | © M. Monier / HI
« Je m’appelle Elena, j’ai 53 ans et je suis originaire de la ville de Bakhmout. J’ai un mari, une fille Yevgenia et un petit-fils de 11 ans. Aujourd’hui je vis dans la ville de Kamienske, dans la région de Dnipro. Comment je me suis retrouvée ici ? C’est une très longue histoire.
Je me souviens du bruit du verre brisé
Ma famille et moi sommes nés et avons grandi dans la ville de Bakhmout, une ville magnifique, vieille de plus de 450 ans. Je me souviens, avant l’escalade de la guerre, à quel point notre vie était belle. Nous avions notre appartement, une belle voiture, nous avions un travail. Moi j’étais secrétaire de direction et manager du service marketing de Artemivsk Electrotechnical Plant. Ma fille, elle, était responsable d’un restaurant.
Nous sommes restés tout le temps que nous avons pu à Bakhmout, car nous n’avions nulle part d’autre où aller. La première attaque d’importance sur la ville a eu lieu en mai 2022 et je me souviens encore du bruit du verre brisé et des blocs de bétons des bâtiments tombés sur le sol. Je me souviens aussi de l’odeur de poudre, de fumée. Nous sommes restés plusieurs mois avec ma famille, même si la situation ne faisait qu’empirer.
C’était comme l’apocalypse
Je me souviens qu’on cuisinait à l’extérieur, il n’y avait plus d‘électricité, ni gaz, ni eau, ni Internet. Tous les magasins de la ville ont fermé, pas de médicaments, pas de médecins, plus rien. Heureusement, nous nous soutenions énormément entre voisins. Il y avait beaucoup d’enfants, dont mon petit-fils qui n’avait que 8 ans à l’époque. Nous leur disions de rester dans les abris, dans des pièces sans fenêtres pour se protéger au mieux en cas de bombardement. C’était comme l’apocalypse.
Il y a eu une autre attaque d’envergure et pendant cette attaque, mon mari a fait un AVC. Heureusement nous avons trouvé des gens pour nous aider à l’évacuer, nous sommes allés à l’hôpital le plus proche, dans la ville de Kostiantynivka, dans la région de Donetsk. Mon mari a pu être soigné et heureusement n’a pas eu trop de séquelles. Nous sommes restés dans cette ville car il avait besoin de soins réguliers, et là-bas contrairement à Bakhmout, il y avait tout, un hôpital, de la nourriture, Internet, j’ai même pu recommencer à travailler pour pouvoir subvenir à nos besoins.
Les débris d’une bombe à sous-munitions
Plusieurs mois plus tard, le 15 mars 2023, une énorme explosion a frappé notre nouvelle maison. Je me souviens que nous étions en train de regarder la télévision avec mon mari, c’était la nuit. Les fenêtres ont explosé, le toit s’est effondré. J’ai été blessée. Mon beau-fils a entravé le couvre-feu pour venir me récupérer et m’emmener à l’hôpital. Il y avait des morceaux de métal dans ma jambe et au niveau de ma colonne vertébrale. Les médecins m’ont dit qu’il s’agissait de débris d’une bombe à sous-munitions. Les morceaux de métal sont toujours là aujourd’hui, dans ma jambe et au niveau de ma colonne.
Une fois que mon état de santé a été stabilisé, nous avons pu rentrer dans notre hébergement. Mais quelques jours plus tard, un nouveau bombardement a eu lieu en plein centre-ville, à proximité de la pharmacie où ma fille avait trouvé un travail.
Un miracle qu’elle soit vivante
Ma fille, Yevgenia a été grièvement blessée à la tête. Une fois arrivée à l’hôpital on nous a dit qu’il ne pouvait pas l’opérer donc les médecins ont choisi de la transporter en urgence jusqu’à Dnipro. J’étais dans l’ambulance auprès d’elle, je me souviens des heures de trajet sur des routes en très mauvais état, pilonnées par les missiles, abimées par les tanks. Une fois arrivée dans le nouvel hôpital, elle est tout de suite partie au bloc opératoire. Ils ont dit que c’était un miracle qu’elle soit vivante et capable de parler après une telle opération. Un morceau de métal n’a pas pu être délogé de son crâne.
Aujourd’hui ma fille est suivie en réadaptation dans un centre à Kyiv, grâce au soutien financier de Handicap International. Merci beaucoup pour cela, de nous avoir tendu la main, vous nous redonnez espoir. Pendant ce temps je m’occupe de mon petit-fils. Parce qu’il est resté pendant des mois dans des pièces sombres, sa vue a beaucoup baissé, mais nous lui avons trouvé des lunettes et il a pu retourner à l’école.
Qui peut prédire ce qui va arriver après ?
Cela fait déjà plus de 1 000 jours... Aujourd’hui je pourrais vous dire que nous avons besoin de tout, car dans notre vie d’avant nous avions tout. Des vêtements, des livres pour mon petits-fils… tout le nécessaire de base dont nous avons besoin tous les jours. Heureusement j’ai pu retrouver un travail, mais cela a pris beaucoup de temps.
Aujourd’hui je peux dire que mon petit-fils et ma fille vivent dans des villes où on n’entend plus le bruit des bombes, bien sûr on entend encore les sirènes, mais cela n’est en rien comparable à ce que l’on a vécu depuis le 22 février 2022. Mais en Ukraine, qui peut prédire ce qui va arriver le jour d’après ? »
1Elena a été soutenue financièrement par Handicap International dans le cadre du projet du ministère allemand des Affaires étrangères (GFFO), qui vient en aide aux personnes blessées par les armes explosives en Ukraine pour obtenir le statut de personnes handicapées.
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