À Genève, les États refuseront-ils le retour des mines antipersonnel ?
Les États parties au Traité d’Ottawa se réunissent le 17 juin à Genève, pour la première fois depuis l’annonce par cinq pays – Finlande, Estonie, Lettonie, Lituanie et Pologne – de leur retrait de la Convention sur l'interdiction des mines antipersonnel. L’enjeu est crucial : ils doivent s’y opposer fermement et convaincre ces États de faire marche arrière et continuer à défendre le Traité.

Monument Broken Chair à Genève devant le Palais des Nations, parée depuis le 5 juin d'une bannière contre le retour des mines antipersonnel. | © V. Vanniasingam / HI
Une conférence cruciale pour défendre le Traité d’Ottawa
Cinq pays – la Finlande, l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie et la Pologne – ont annoncé en février et mars 2025 leur intention de quitter le Traité d’interdiction des mines et expriment leur volonté d’utiliser cette arme pour faire face à une éventuelle offensive russe. S’ils se confirmaient, ces retraits seraient une première dans l’histoire du Traité d’Ottawa. L’interdiction des mines, ces armes barbares qui tuent et blessent à 85 % des civils, avait été obtenue de haute lutte en 1997 avec l’adoption du Traité d’Ottawa. Ce traité est aujourd’hui adopté par 165 États dans le monde et l’interdiction des mines antipersonnel est devenue une norme universelle.
Le retrait annoncé de ces cinq pays marque un recul sans précédent du Traité d’Ottawa et porte une grave atteinte à la protection des civils dans les conflits armés.
La Conférence, qui se déroule à Genève du 17 au 20 juin prochain, réunira les États parties au Traité d’Ottawa. Elle a pour objectif de suivre leurs avancées dans la mise en œuvre du traité et de ses obligations, notamment sur la décontamination des terres, l’assistance aux victimes ou encore la destruction des stocks de mines antipersonnel. Dans ce contexte de grande instabilité, elle revêtira une dimension cruciale.
« Dans un contexte géopolitique extrêmement tendu, nous ne remettons pas en cause la nécessité, pour certains États européens, de se préparer à l’éventualité d’un conflit. Mais le choix des moyens de défense doit rester compatible avec le Droit international humanitaire (DIH). Les mines antipersonnel ont une utilité militaire limitée, pour des conséquences qui sont toujours dévastatrices et à long terme sur les populations civiles. Le retrait de ces cinq pays concerne tous les autres États parties au Traité d'Ottawa, qui doivent réagir et déployer tous les efforts possibles pour défendre le traité, tenir bon sur le respect du DIH et empêcher le retour des mines antipersonnel. »
Anne Héry, Directrice du plaidoyer à Handicap International
Une mobilisation d'envergure
Le 5 juin 2025, à quelques jours de l’ouverture de la Conférence, une immense bannière a été installée par la Campagne internationale pour interdire les mines antipersonnel (ICBL) avec le soutien de Handicap International, l'un de ses membres fondateurs, sur le monument « Broken Chair »* face aux Palais des Nations à Genève. Cette bannière représente un pied se posant sur une mine antipersonnel, pour rappeler à quel point ces armes touchent indistinctement les populations civiles et les militaires. Elle appelle également les cinq pays concernés à rester engagés dans le Traité d’Ottawa. On peut lire sur cette bannière en anglais : « Les mines ne choisissent pas leurs victimes. 85 % des victimes de mines sont des civils. Estonie, Finlande, Lettonie, Lituanie, Pologne : restez dans le Traité d'interdiction des mines. »
Handicap International et ICBL demandent aux États participants à la conférence du 17 juin :
- de réaffirmer leur engagement contre les mines antipersonnel ;
- de défendre le Traité d’Ottawa de toutes leurs forces ;
- d’inciter les pays désirant se retirer du Traité d’Ottawa à en rester membres.
La force du Traité d’Ottawa
Depuis sa mise en œuvre il y a plus de 25 ans, le Traité d'Ottawa a fait preuve d’une efficacité indéniable pour éradiquer les mines antipersonnel et protéger les civils dans les conflits armés. Premier traité historique d’interdiction d’une arme conventionnelle, il a permis de réduire le nombre de victimes de mines, qui est passé d’environ 25 000 en 1999 à moins de 5 000 en 2023. Le nombre d’États et de régions dont les terres sont contaminées par les mines a également diminué de manière significative, passant de 99 en 1999, à 58 en 2024.
Les mines antipersonnel aujourd’hui dans le monde
5 757 personnes ont été tuées ou blessées en 2023 par des mines antipersonnel ou des restes explosifs de guerre, une augmentation de 22 % par rapport à 2022 (4 709 victimes). Les civils représentaient 84 % des victimes enregistrées en 2023.
Des victimes de mines antipersonnel et de restes explosifs de guerre ont été enregistrées dans 55 États et autres régions en 2023. Les dix pays ayant enregistré le plus grand nombre de victimes en 2023 étaient le Myanmar (1 003), la Syrie (933), l'Afghanistan (651), l'Ukraine (580) et le Yémen (499).
Des mines antipersonnel ont été utilisées par l'Iran, le Myanmar (Birmanie), la Corée du Nord et la Russie entre mi-2023 et octobre 2024. La Russie a largement utilisé les mines antipersonnel en Ukraine. Des informations crédibles indiquent que l'Ukraine, qui est État partie au Traité d'Ottawa, a utilisé des mines antipersonnel à Izium et dans ses environs en 2022.
Des groupes armés non étatiques dans au moins cinq États – Colombie, Inde, Myanmar (Birmanie), Pakistan et Palestine (Gaza) – ont également utilisé des mines antipersonnel.
Source des chiffres : Rapport 2024 de l’Observatoire des mines.
* Broken Chair est une sculpture monumentale en bois de l'artiste suisse Daniel Berset, réalisée par le charpentier Louis Genève pour Handicap International sous l'impulsion de la section Suisse de l'association. Elle représente une chaise géante avec un pied cassé et est exposée sur la place des Nations à Genève depuis 1997, devant le siège européen de l’ONU. Faite de 5,5 tonnes de bois Douglas et haute de 12 mètres, Broken Chair incarne le cri désespéré, mais digne, des populations civiles massacrées par toutes les formes de violence armée, notamment celle des mines antipersonnel, et l’obligation faite aux États de protéger les populations et de porter secours aux victimes. Cette sculpture hautement symbolique invite chacun à refuser l’inacceptable et à agir, notamment en signant l'appel de HI contre les mines, afin que les droits des personnes et des communautés à obtenir une juste réparation soient honorés.
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