Axelle Red : « La situation des réfugiés syriens me touche énormément parce que cela pourrait nous arriver à tous »
Femme de conviction et de cœur, engagée depuis plusieurs décennies dans des causes humanistes, Axelle Red est ambassadrice de Handicap International depuis 2017. Son répertoire, à découvrir ou redécouvrir, est un beau voyage dans les méandres de l’âme humaine et du monde, où elle arbore toujours la flamme de l’espoir. Entretien.

Axelle Red : « Je me souviens très bien de l’instant où j’ai pris cette petite fille dans mes bras. Cette fillette syrienne ne se rend compte de rien aujourd’hui, mais son enfance est volée. » | © Laurie Dieffembacq-Belga / HI
Votre chanson intitulée Pas maintenant raconte l’histoire d’un enfant qui marche sur une mine. Votre texte entre en résonance avec le combat de Handicap International contre les armes explosives de guerre. Qu’est-ce qui vous a inspiré cette chanson magnifique ?
Axelle Red : J’ai eu la chance d’aller au Vietnam à une époque où très peu d’étrangers pouvaient entrer dans ce pays. J’ai vu à cette époque énormément de personnes mutilées. Je me souviens d’un homme avec un morceau de bois en guise de jambe qui avançait avec toute sa dignité. Il m’a donné envie d’écrire une chanson. Souvent, lorsque j’écris, je mêle les histoires de plusieurs personnes que j’ai rencontrées. En tant que marraine du combat contre les mines antipersonnel, c’était pour moi une évidence d’écrire sur ce thème. Un enfant qui marche sur une mine croit vraiment qu’il va mourir. J’ai écrit « On dit qu'le ciel devient plus bleu. Quand on s'en va. » Le ciel est une image forte qu’on retrouve aussi dans la chanson Manhattan Kaboul où Renaud dit « Mon ciel si bleu est devenu orage ». Quand Renaud m’a contactée pour chanter avec lui, je me suis sentie « une » avec la chanson car j’avais la même image à l’esprit.
Vous êtes allée récemment dans le camp d’Azraq en Jordanie. Qu’est-ce qui vous a marqué lorsque vous avez rencontré nos bénéficiaires et nos équipes sur le terrain ?
Axelle Red : Dans ce camp de réfugiés, j’ai échangé avec des hommes, des femmes et des enfants qui ont dû quitter leur foyer à cause du conflit syrien. Ils ont tout perdu, mais gardent un regard positif sur la vie. Leur situation me touche énormément parce que cela pourrait nous arriver à tous.
Je trouve l’œuvre de HI incroyablement belle, les équipes qui travaillent sur le terrain sont motivées. Il y a tellement de gens qui veulent du changement et qui le font. L’engagement de toutes ces équipes depuis tant d’années a un impact sur la vie d’autres personnes.
Finalement, beaucoup de personnes dans nos pays riches sont malheureuses et dépressives parce qu’elles ne savent pas que la clé du bonheur c’est de partager et de donner aux autres.
J’ai aussi vu ici – en France et en Belgique – des professionnels et des bénévoles très impliqués. C’est à travers eux que je puise mon optimisme, je me dis qu’il y a tellement de gens qui veulent du changement et qu’ensemble, on va faire avancer les choses.
> Voir d’autres photos d’Axelle Red avec les bénéficiaires et les équipes de HI en Jordanie
Partir sur le terrain est une expérience humaine hors du commun. Dans quel état d’esprit êtes-vous lorsque vous rentrez d’un pays où vous avez vu des personnes traumatisées et parfois mutilées ?
Axelle Red : On est en effet témoin de situations atroces et on se sent très impuissant une fois de retour. Ceux qui restent sur place et qui agissent, aident. Beaucoup de professionnels qui reviennent du terrain ont besoin d’un suivi thérapeutique. Je garde de réels traumatismes de mes visites, liés par exemple à la situation de certaines femmes victimes de violences qui se sont confiées à moi. Quand je reviens en Europe, je me dis que j’aide avec ma notoriété et ma musique. La moitié de mon répertoire comporte des chansons engagées. Mon traumatisme, je le traite en quelque sorte à travers mes chansons. La musique est aussi pour moi une sorte de thérapie.
Le titre de votre dernier album, Exil, fait-il référence à celui que vivent ces familles ?
Axelle Red : J’ai traité le mot « exil » dans plusieurs sens. Il y a ceux qui doivent s’exiler et n’ont nulle part où aller, mais il y a aussi ceux qui s’exilent pour d’autres raisons et motivations. Ils en paient tous un lourd tribut. Il y a de nombreuses lectures possibles dans ma musique et j’y tiens car c’est aussi tout l’intérêt de la poésie. L’important pour moi est de toucher le public en lui laissant sa liberté d’interprétation.
Avez-vous transmis votre engagement à vos enfants ?
Axelle Red : Mes filles sont engagées intellectuellement et très empathiques, ce qui n’est d’ailleurs pas toujours facile dans une société qui juge avec d’autres valeurs. Je crois beaucoup en ce mot : l’empathie. Sister And Empathy est d’ailleurs le titre d’un de mes albums. Pour moi, on n’a pas à dire aux gens ce qu’ils doivent faire mais leur donner envie d’aider, qu’ils le comprennent d’eux-mêmes. Je trouve que les jeunes ont plus conscience de ce qui se passe dans le monde. Cette prise de conscience s’est d’abord affirmée dans le domaine de l’environnement. C’était en quelque sorte une cause plus urgente que la cause des femmes. Je suis certaine que pour la prochaine génération, l’égalité sera quelque chose de plus naturel.
Vous avez beaucoup écrit sur les violences faites aux femmes à une époque où ça n’était pas forcément un sujet de société…
Axelle Red : Je suis contente qu’aujourd’hui on en parle. En 2009, j’ai écrit un album en anglais, Sisters And Empathy, qui traite des violences sexuelles envers les femmes et les filles. Un album aux thèmes lourds sur la prostitution, le trafic humain, la pédophilie. J'avais besoin d'écrire cela, de dénoncer, comme une sorte de thérapie. La seule chose que je puisse faire est de témoigner pour sensibiliser. Nous avons tous et toutes un rôle à jouer.
Reportage photo en Jordanie © Laurie Dieffembacq-Belga / HI
14,2 % des enfants syriens de moins de 14 ans sont handicapés. Victimes d'un conflit marqué par l'utilisation massive et continue d'armes explosives, ils doivent faire face à des blessures complexes qui engendrent de graves séquelles invalidantes. Nos équipes les accompagnent avec des sessions de réadaptation fonctionnelle (kinésithérapie et ergothérapie) et de soutien psychosocial.
Axelle Red, ambassadrice de HI, avec la maman de Fadi, un enfant syrien blessé par balle il y a quatre ans. Sa blessure a causé un traumatisme cérébral, entraînant une paralysie du côté gauche. La pose d’une orthèse a permis de soutenir son pied et sa cheville ; des sessions de kinésithérapie ont amélioré sa mobilité, lui permettant de marcher avec une aide. HI lui a également fourni un fauteuil roulant et du matériel adapté à son handicap.
Quelque 2,6 millions d’enfants syriens sont réfugiés. On estime que 79 % d’entre eux ont vu un membre de leur famille mourir et ont un besoin urgent d’une aide psychologique. Handicap International mène des actions de soutien psychologique en plus du travail de réadaptation mené auprès des personnes amputées.
Une question ? Une remarque ? Nous sommes à votre écoute !
Relation Donateurs
Contactez notre équipe du lundi au vendredi de 9h à 18h au 04 78 69 67 00 ou à [email protected]
Au plaisir d’échanger !
> Voir aussi la FAQ
Équipe Mobilisation
Vous souhaitez devenir bénévole ou partager des idées d’actions solidaires ? Contactez-nous par mail [email protected]
Relations Presse
Journalistes, médias : notre attachée de presse est joignable au 06 98 65 63 94 ou par mail [email protected]
> Voir l'espace Presse
Collectes frauduleuses
Des escroqueries à la charité peuvent être commises en notre nom dans l'espace public, par téléphone ou par e-mail. Consultez notre page dédiée pour toute information ou contactez-nous directement au 04 78 69 67 00 ou par e-mail : [email protected]